3. Expérimentation IBEST
3.1. Implémentation
Afin de tenter de pallier aux écueils vus précédemment, des indicateurs alternatifs (IBEST, Indicateurs de Bien Être Soutenable Territorialisé) ont été mis en place dans la métropole grenobloise. Les objectifs principaux de cette expérimentation sont de produire et questionner des indicateurs et de transformer le référentiel en matière de politiques publiques.
L’expérimentation a été confrontée à plusieurs exigences, telles que la nécessité d’utiliser la donnée existante, la volonté de créer des indicateurs à une échelle infra-communale ou communale ou encore la nécessité de pouvoir récolter la même donnée dans des intervalles de temps réguliers et dans des limites de coûts raisonnables.
Il existe alors deux voies possibles pour récupérer des données permettant de créer des indicateurs alternatifs: soit le « détournement » d’un certain nombre d’indicateurs, soit la création d’indicateurs nouveaux à partir de données enregistrées par divers organismes.
Pour l’expérimentation IBEST, la deuxième option a été choisie, avec la distribution d’un questionnaire de 86 questions à l’ensemble du territoire. Après la récolte du questionnaire, plusieurs réunions ont eu lieu pour discuter des résultats et des conclusions du questionnaire. Ces réunions ont rassemblé des professionnels et des citoyens, différentes parties prenantes (politiques, sociales, etc.).
Un point essentiel de l’expérimentation IBEST est l’hybridation entre la récolte des données et les discussions entre différentes parties prenantes. Il est intéressant de noter que l’hybridation a mené à des conclusions différentes. Par exemple, la dimension « sociabilité », très présente dans les résultats du volet quantitatif de l’expérimentation IBEST, mais elle n’a pas été retenue par les citoyens. Pour les citoyens, le bonheur renvoie à des plaisirs ponctuels dépendant des goûts de chacun.
Grace à cette hybridation, le processus de construction des indicateurs n’apparaît plus comme linéaire, mais comme itératif, soit un aller-retour s’opérant entre les rhétoriques sociales et les rhétoriques statistiques. Dès lors, les indicateurs ne peuvent plus être conçus comme les reflets ex nihilo d’une réalité déjà préconstituée, mais sont des constructions sociales servant de base à la discussion collective qui elle-même vient alimenter leur transformation.
Voici un récapitulatif des dimensions jugées importantes pour la construction d’un indicateur bien-être selon différentes parties prenantes:
3.2. Conclusion de l’expérimentation
L’expérimentation permet de mettre en avant diverses conclusions:
- les relations interpersonnelles, peu prises en compte dans les politiques publiques, jouent un rôle primordiale dans la satisfaction ressentie à l’égard de la sociabilité,
- il n’existe pas pour les personnes une seule manière de s’épanouir dans leurs relations, mais une pluralité de pratiques sociales en fonction des personnes variables selon leurs parcours sociaux
- les individus sont des êtres sociaux et les relations sociales sont une composante importante de leur épanouissement,
- les ressources non monétaires sont essentielles au bien-être des personnes et sont articulées aux ressources monétaires
- l’appréciation portée par les personnes sur leurs situations ne s’explique jamais uniquement au regard de la possession de ressources monétaires
Les résultats des traitements statistiques par dimension de l’expérimentation IBEST confirment que la personne est davantage un “homo socialis” qu’un “homo œconomicus”.
Conclusion
Les indicateurs sont des objets construits, qu’on peut légitimement remettre en question. Dans le cadre de l’exploration des indicateurs du bien être, c’est l’enchevêtrement du quantitatif et du participatif qui permet de sortir de plusieurs écueils concernant les indicateurs.
Pour approfondir le sujet de l’expérimentation IBEST et continuer de questionner ce qu’est le bien-être, vous pouvez visionner la présentation de Fiona Ottaviano: https://youtu.be/cYLStHjemto?si=-Eibi5ZWZZwhpTkx
